Les rencontres aussi palpitantes qu’appétissantes — #3
Par ces belles et chaudes journées d’été, on part à la rencontre rafraichissante de Valérie & Jean-Marie : direction Le Croisic et ses jardins de la mer !

Vendredi après-midi, 13h00, départ pour une balade de pêche à pied… d’algues. Quoi ?! Ca se mange les algues ?
Valérie :
“Bien sûr ! Cru, cuit, frit : il y a tellement à faire avec cet aliment santé : plein de vitamines et minéraux, coupe-faim et facile à trouver en bord de côte.
Le fucus/goëmon ne sert pas qu’à présenter les fruits de mer au restaurant.
La nori que tu retrouves dans ton ramen ou tes sushis on en trouve ici, il y a même une variété d’algue qui une fois séchée a le gout de jambon; une autre d’huître !”
Métier hérité ? Métier de passionné ? Métier recommandé ?
Comment en êtes-vous arrivés là tous les deux ?
Comment en êtes-vous arrivés là tous les deux ?
Jean-Marie :
“C’est un retour aux sources pour moi qui ai grandi sur la Presqu’ile guérandaise. Le site de la ferme marine est une ancienne saline (de marais salants ndlr) que mes parents rêvaient toujours d’acquérir en passant devant en vélo des années durant et puis un jour ce fût chose faite (me confie-t-il en regardant l’arbre qui nous abrite et partageant qu’il l’a planté enfant) !
Avec Valérie on a toujours eu les mains dans l’eau : d’abord une grande carrière au sein des aquariums — j’ai même fini Directeur Général de l’aquarium de Lyon — et Valérie avait la fibre pédagogique avec des ateliers sur les sens et particulièrement la découverte par le goût avec les enfants.
Changement de vie pour la famille, installation au Croisic au milieu de l’espace naturel protégé de 7 ha familial alimenté en direct par la mer depuis plus de 500 ans.
On s’est alors lancé dans la nurserie et l’écloserie d’huîtres, activité malheureusement et complètement entachée par l’épidémie d’il y a quelques années qui nous a fait arrêter et invité à se tourner vers l’aquaculture.
Mon père fournissait de la nourriture pour les aquariums. Nous on a préféré utiliser les algues qui bordent notre littoral et leur redonner leurs lettres de noblesse à notre façon et avec notre passion; et on a donc désormais aussi les pieds dans l’eau !”

Une anecdote à partager sur un élément étonnant de votre métier ?
Jean-Marie :
“Cueillette, transformation, livraison, on s’occupe de tout et ce à raison d’environ 260 sorties en mer par an, quels que soient le temps et les éléments. J’ai compté récemment, j’en suis à 1 000 cueillettes en 4 années !
A chaque fois c’est un émerveillement de la beauté fascinante et toujours étonnante de l’univers marin mais aussi quelques bonnes chutes/glissades.”
Une fois ramassées (coupées non pas arrachées), que deviennent les algues ?
Jean-Marie :
“On a monté une petite entreprise, qui dit petite entreprise dit performance = qualité = fraîcheur. On a choisi la niche des restaurants gastronomiques. Après un test en local avec un chef étoilé : succès et zou c’était parti.
On s’est fait connaître aux grands chefs de la capitale par un revendeur sur Rungis mais sommes revenus au circuit court en direct dans un souci d’accord avec nos valeurs : on veut être en phase avec les cuisiniers qui utilisent nos produits et leur cuisine.”

En tant que cueilleur du dimanche ou consommateur final on vit déjà une belle expérience mais côté coulisses, qu’est-ce qui vous prend le plus de temps ?
Jean Marie
“Pas une chose mais tout ! On a des milliers de choses à gérer conjointement : le séchage selon les conditions météo, les cueillettes selon les marées et les commandes, l’organisation des sorties pêche à pied et ateliers de cuisine… Ca nous demande une capacité d’adaptation et de réactivité folle de base.
Tout comme notre expertise de conseil de chefs pour répondre toujours plus à leur problématique de recherche de saveurs/textures/mâche/couleur. C’est du temps, de l’attention, des tests !”
Un moment beau, bien et bon ?
Jean-Marie :
“ Arf, il y en a pleins ! Mais je dirais le coup de fil d’un grand monsieur au top de la cheffitude il y a peu : Pierre Gagnaire, meilleur chef du monde, qui nous a partagé être fan du caviar d’algues dans des termes qu’on ne m’avait encore jamais évoqué. 🙂
Avec le déconfinement, on a de plus en plus de visites de grands chefs qui prennent le temps de venir découvrir l’exploitation et de partager un moment ensemble au plus près des produits. La semaine dernière on avait les chefs du Plaza Athénée et du Meurice par exemple !
Valérie :
“Ma saison préférée pour la cueillette c’est à l’automne, ce que j’appelle le petit printemps ! Les algues redémarrent un cycle et c’est un bonheur côté jeunes pousses.”
Un aliment méconnu ou mal utilisé à nous refaire aimer ?
Valérie :
“La laitue de mer !
Elle est assimilée aux marées d’algues vertes donc mal aimée mais si mal connue ! C’est 8 à 10 fois plus de vitamine C qu’une orange, facile à ramasser (on a tous joué avec enfant) et super pour envelopper des filets de poisson ou de veau comme Eric Guérin récemment.
On peut tout faire avec les algues : de l’agar agar pour cuisiner de bons petits plats, se protéger du soleil avec le gel anti UV naturel qu’elles contiennent, des chips à grignoter, de quoi pimper ses salades fraîches,… Et c’est grâce à elles qu’est conçu 50% de l’oxygène que nous respirons !”
Dans votre dernier repas, on retrouve quoi ?Jean-Marie :
“En entrée : des coquillages ! Mmmh des coques accompagnées de spaghettis de mer (#algues). En plat, j’adore l’anguille donc de l’anguille grillée. Du fromage, absolument du fromage ensuite puis du gwell, un lait de vache pie noir fermenté (entre le lait ribot et la faisselle ndlr) ou du gâteau au chocolat !”

Quels animaux croise-t-on lors des cueillettes d’algues ?
Valérie :
“Des étoiles de mer, des concombre de mer — j’en ai vu un énorme la semaine dernière — et de petites araignées.
Mais mon animal préféré ce sont les botrylles, comme de petits insectes qui forment une myriade d’étoiles en petite croûte sur les rochers et les algues qu’ils recouvrent.”
Partez vite à la (re-)découverte des algues avec les sorties en bord de mer et les ateliers de cuisine des Jardins de la Mer !
Pour déguster leurs produits, Valérie vous attend sous les halles du Marché du Croisic le samedi et vous les retrouverez aussi tout bientôt dans la e-boutique des Saveurs Détonnantes !